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samedi 5 mai 2012

Le Revest-les-Eaux



Le Revest est à 7 kilomètres au nord-ouest de Toulon ; on y arrive par la départementale 846.



Le Revest domine la profonde et large vallée d'Ardène. Les oliviers grimpent à l'avant des mamelons rocheux. De rares mûriers sont les survivants d'une culture autrefois importante. Les carrières de bauxite et de pierres sont riches. On repéra, jadis, des mines de houille qui ne furent jamais exploitées ; une mine de plomb à gangue de quartz aurait été exploitée par les Celto-Ligures.



Le mot « Revest » désigne l'envers de l'endroit. Il signifie aussi le revers. En provençal, il a donné « Revessa », renversé ou renverser. Dans son Trésor du Félibrige, Mistral a signalé au mot « Revèsso » l'expression « revesso de mistrau », vent d'ouest-nord-ouest, ce qui situe le lieu dans un secteur nord. Revest est donc synonyme de « ubac », versant à l'ombre, son opposé étant « l'adrech, ou l'adret, ou l'adroit ».



Habité par les Commoni, peuplade celto-lygienne, dont il était le chef-lieu, le Revest contenait ses maisons dans la partie comprise entre la tour et l'enceinte qui s'élevait sur les ruines que nous trouvons aujourd'hui. Construction très forte, solidement établie au sommet d'une colline, la tour pouvait, par ses dimensions, contenir une cohorte importante de gens d'armes avec leurs munitions. Sans risquer d'être sérieusement endommagée, elle pouvait résister à un siège, même long.



Carré parfait, la base de ce repaire est de 8,10 mètres de côté et bâtie à même le rocher : sa hauteur est de 12 mètres et l'épaisseur de ses murs est de 2 mètres. Sa construction est faite de moellons calcaires conchyliens de moyen et petit appareil, posés par bandes régulières.



Composée d'un magasin voûté, d'un premier étage et d'une plate-forme, elle subit, en 1865, différentes transformations nécessitées par la pose d'une horloge sur la plate-forme. Ces travaux amenèrent la municipalité de l'époque à ouvrir une porte sur la façade est, et la destruction presque complète de la voûte du magasin, pour laisser descendre les poids de l'horloge.



On découvrit un important dépôt d'armes, composé de flèches d'arcs, de fers de lances et de nombreux boucliers ronds.



Très sûr et très bien gardé, ce magasin était le « coffre-fort » des habitants, qui y mettaient à l'abri les produits métalliques et autres avant de les vendre ou de pouvoir les transporter jusqu'à la tour du Rega à Sanary. De là, ils étaient acheminés par barques sur les lieux où ils étaient transformés.



Dès le 13ème  siècle, le Revest est l'enjeu des aspirations de Geoffroy IV, seigneur   de   Toulon,   et   de   Guillaume,   seigneur   d'Ollioules.   Geoffroy l'emporte après le verdict rendu par Monseigneur G. Rostang, évêque de Toulon. Dès cette époque, le Revest et d'autres quartiers limitrophes font partie du territoire de Toulon.



Morte en 1261, Sibille, dernière descendante des seigneurs de Toulon, donna Toulon  à Charles  Ier  qui la fit passer dans le domaine  Comtal.

Elle devint chef-lieu d'un baillage dont le Revest faisait partie tout en étant la propriété des Chartreux de Montrieux, à qui Sibille en avait fait don par testament, y compris « la Seigneurie, ainsi que tous les droits qu'elle peut avoir ou qu'elle a sur ce château et Seigneurie ».



Beaucoup plus important qu'il n'apparaît aujourd'hui, le Revest de par sa position stratégique, occupait une place de choix dans l’organisation défensive des proches abords de Toulon. Lieu de repli idéal, bien défendu et bien protégé, il contribuait à l'impôt en partageant avec Toulon, dès 1276, le prix d'une cavalcade d'un chevalier armé.



En 1374, c’est Raymond de Montanban (alias Montalban, seigneur de « Dardenne ») qui, en s'emparant du Revest, remet en question les clauses du testament de Sibille. Les Chartreux de Montrieux se défendent et obtiennent sain de cause auprès du bailli de Toulon. Ils sont confirmés dans leurs titres de propriétaires de la Seigneurie : château et terres.



L'année 1395 voit de nouveaux combats se dérouler dans le village. Les Toulonnais l'assiègent. Le Revest n'est pas le seul à subir l'acharnement de ses proches voisins : le château de Tourris est lui aussi malmené par les hommes venus de Toulon. Par délibération du Conseil de Ville de Toulon, en date du 27 avril 1395, Messieurs Vincent et Antoine, nobles, et Messieurs Antoine et Jacob sont priés de se rendre auprès du sénéchal et du Conseil Général, pour régler au mieux la paix qui est espérée entre la ville et Tourris et le Revest.



Le 20 juin (1395) le Conseil de Ville de Toulon décide qu'il sera payé 12 florins à Guillaume de Coreis pour le surplus de lances qu'il a fournies à la ville de Toulon et au château du Revest. Le Revest participait avec Toulon au siège de Pertuis, comme venait d'en décider le dernier conseil tenu à Tarascon, sous les ordres du seigneur Sénéchal. Mais l'organisation « du guet », la réfection et l'entretien des défenses et remparts préoccupent beaucoup les édiles toulonnais. On craint même une « descente du roi d'Aragon ». Les pirateries des Catalans inquiètent. On ordonne de faire des provisions. On répartit les postes de garde et on désigne ceux qui en seront chargés (1428).



Le « rôle du guet » est une fois encore révisé en 1442. En avril de la même année, on recommande de faire « bonne garde » aux portes. On craint une attaque des Génois. On s'en plaint en haut lieu.



Mais d'autres différends entre Toulon et le Revest ont surgi entre temps. Les Revestois ne répondent pas aux demandes des Toulonnais. C'est le  roi  René  qui,  en   1442,  tranchera  les litiges.



Le trésorier de la communauté de Toulon devra payer toutes les factures qui concernent les travaux de fortifications. Pour finir et achever ces ouvrages, on sommera le lieutenant du bailli d'écrire aux syndics du Revest qu'ils auront à fournir cinquante pieux pour « la finition de la palissade  » (1443).



En 1447, les choses ne sont pas encore arrangées définitivement entre les deux communautés et, au Conseil de Ville de Toulon, on reparle du litige entre Toulon et le Revest.



Lors du recensement général des lieux, villages et châteaux inhabités, ordonné en 1540, en vertu d'un arrêté du Parlement de Provence, le sieur Louis Burle, membre de la Cour des Comptes, désigné pour visiter notre région, présenta le rapport suivant à la Cour : « Le jeudi vingt-deuxième jour du mois de juillet de l’an 1540, je me suis fait transporter au lieu de Tourris, auquel lieu je n'y ai trouvé personne, preuve qu'il n'est pas habité, et me suis retiré au Revest qui proche dudit lieu et la, dans la maison d'un particulier dudit lieu, ai fait appeler Hugues Vidal, syndic dudit Revest ; Jehan Dartigue, Hugues Hermitte et Pierre Vidal, lesquels, interrogés par moi pour savoir dans quel lieu se trouvait le château de Tourris et quelles maisons y a et quelles charges ont, ont dit que le terroir de Tourris est possédé tant par les hommes du Revest que par ceux de la Valette ; qu'au dit lieu, il n'y a ni maisons ni châteaux, car tout est détruit ; qu'il y a des bastidons pour la remise des hommes quand ils vont travailler. Quant aux charges, ils payent la basque (droit sur les fruits et légumes) au seigneur de Tourris et un onzième sur les blés et autres, et une dîme d'un treizième au chapitre de Toulon ; ils n'ont pas d'autres charges. Quant aux commodités, ils ont dit que le terroir est bon, qu'il y a des pasturages, auxquels les hommes de Revest, de la Valette, de la Garde et de Toulon ont droit. Quant au Revest, ont dit qu'il y a 46 maisons habitées et qu'ils font à leur Seigneur semblables tasques et censés qu'au Seigneur de Tourris pour le terroir dudit Tourris ; ils payent la dîme au dixième, le fourrage au vingt-cinquième et la monture au vingtième. Quant au terroir, on dit qu'il est malaisé à cultiver. »



Pendant la Ligue, en 1585, le seigneur du Revest était sous les ordres du seigneur de Vins, Hubert de Garde.



En 1592, la tour du Revest vit les forces du capitaine Belloc la menacer ; elle fut sérieusement défendue et les assiégés obligèrent les assaillants à se retirer. Un autre groupe d'ennemis, sous le commandement du duc d'Eperon, mettait le siège devant le château de Val d'Ardène.



Séjour d'été et rendez-vous de chasse du roi René, le château du Revest est flanqué deux tours en poivrière reposant sur des culs de pierre, ornés d'éperviers sculptés, en façade sud. Une troisième tour  cylindrique arrondit l'angle nord-est.



C'est en 1472 que le roi René vendit, sans clause de retour ni aucune réserve de rachat, la seigneurie du Revest à M. d'Arcussia de Palières, seigneur d'Esparron, pour la somme de 100 écus soleil d'or.



En 1866, une partie du château fut transformée en moulin à huile et tous les accessoires que la fabrication du produit exigeait y furent installés.



Le 26 mars 1666, le sieur Gubert prêtait à la commune la somme de 522 lires pour participer au rachat de Balthazar Vidal, détenu comme esclave dans Tunis.

C'est le 9 juillet 1687 que l'intendant de Provence ordonnait aux consuls du Revest de régler rapidement aux sieurs Martinenq Joseph, visiteur des gabelles de Provence, et Jean Martinenq, bourgeois de Toulon, les sommes que leur devait la communauté.



Par la même ordonnance, les consuls étaient autorisés à se pourvoir contre les « délibérants » qui ont, par leur mauvaise administration, donné lieu à la condamnation de la communauté.



Pendant le siège de Toulon, en 1707, les troupes du prince Eugène de Savoie se montrèrent si odieuses envers les habitants du Revest que les consuls et la population demandèrent au prince de les défendre et consentirent à assurer l'ordinaire des militaires.

Le prince logeait au château de la Val-d'Ardène. Les désirs de la population et des consuls furent contrecarrés ; une forte troupe française surprit les Savoyards du Revest, les chassa, fit de nombreux prisonniers. Furieux de son échec, Eugène de Savoie fit incendier le village.



Quatorze ans après c'est un nouveau fléau qui vint s'abattre sur la population provençale et particulièrement sur celle du Revest. De tous les villages composant la viguerie de Toulon, le Revest fut le plus atteint par la peste. Le tiers de la population mourut. Le second consul et ceux chargés des secours étaient malades. Le Revest s'était ruiné pour tenter de défier le mal. Le pain et la viande allaient manquer ; 600 livres furent allouées à la courageuse collectivité. La situation déjà douloureuse devint vite catastrophique. Le seigneur du Revest fit appel au cœur de l'Assemblée qui vota 400 livres de secours. Sur 500 habitants, 300 étaient morts, 150 étaient malades ; le reste, atteint ou non, était disséminé dans la campagne. Les deux premiers consuls étant morts, c'est le troisième consul, Sauvaire, qui signait, le 7 novembre 1721, l'acte proclamé en l'hôtel de ville de Toulon pour faire renaître la prospérité dans la viguerie. Le mal et la rechute étant de nouveau à craindre, les consuls du Revest firent garder le poste du bois d'Orves pour prévenir toute arrivée de personnes étrangères à la commune.



Dans le cadre des mesures arrêtées, le Revest fournissait et détachait 7 hommes à la compagnie des gardes-côtes de la Valette. Forte de 50 hommes, elle appartenait au bataillon de Toulon qui en comptait 650.



Le 5 janvier 1765, le Revest demandait un dégrèvement d’impôt, la récolte d'huile n'étant pas bonne.





Les Seigneurs du Revest





François d’Arcussia, qui acquit en 1472 le château du Revest, eut un fils : Charles. Celui-ci épousa, le 7 juin 1575, Marguerite de Forbin-Janson.



Il est l'auteur de La Fauconnerie de Charles d'Arcussia de Câpre, seigneur d'Esparron de Palières, et du Revest-en-Provence (divisée en quatre parties, avec figures), qui fut rééditée plusieurs fois. Une première fois à Aix, en 1598, in-8°, chez Tholozan. À Paris, en 1604, 1608, 1615 et 1621, in-8°. Ce même ouvrage, divisé en deux parties, dédié au roi, avec «des portraits au naturel des oiseaux », fut édité à Paris, chez Houzsl, en 1627, in-4° : puis à Rouen, en 1644, in-4°.



Ce livre, qui est un classique du genre, a obtenu, il y a quelques années, à Paris, Hôtel Drouot, des enchères très élevées. C'est très probablement Charles d'Arcussia qui a fait construire le bâtiment cylindrique connu aujourd'hui sous le nom de « Pigeonnier ».



François d'Arcussia eut un autre fils,  prénommé Jean-Baptiste.



Le 9 septembre 1480, le domaine seigneurial passe dans la famille de Bertrand de Vintimille, comte de Marseille. Plusieurs familles acquièrent des terres de la Seigneurie et portent alors le titre de coseigneur du Revest; ainsi les Mathei (1501); les Parisiis (1509); les de Vêteris (1554), etc.



À sa mort, en 1620, Balthazar de Parisiis (ou de Paris), qui avait acheté la moitié de la terre du Revest, laisse celle-ci, par testament, à son fils (?) Honoré de Thomas et à demoiselle Roxane, sa fille, dame du Luc, mariée à François de Vintimille. François et Roxane de Vintimille eurent une fille, Marie, qui hérita de sa mère.



Honoré de Thomas vendit sa part à François de Vintimille, seigneur du Luc, pour la somme de 85.000 livres, le 28 novembre 1644.



Quatre ans après, la terre et seigneurie du Revest sont transférées à la famille de Jean de Noble.



Écuyer de la ville de Toulon, fils d'Antoine de Noble et petit-fils de Jean I, Jean II de Noble acquit la seigneurie du Revest en 1647, par acte de Jacques aîné, notaire au Luc. En 1643, Jean II de Noble recevait 1.010 livres de la communauté de Toulon pour s'être engagé à renoncer à construire des « engins » (paroirs à drap, moulins, etc.) sur ses terres, au pied de la source de la Foux. Cette défense qui lui était faite était valable pour ses successeurs.



Jean de Noble eut plusieurs enfants. L'un d'eux, Joseph, vend une portion de terre à la communauté de Toulon en 1703. Son autre fils, Jean-François de Noble, officier de marine, resta vingt-deux ans titulaire de la seigneurie.



Charles, troisième fils de Jean, possédait en 1655, avec son père, «plusieurs pièces de biens» sur le terroir du Revest (livre Terrier).



C'est au décès de Jean-François de Noble, en 1739, que la terre et le château du Revest passent dans la famille de M. Louis-Charles de Chalendar de la Motte, capitaine de cavalerie au régiment Royal-Cravatte. Cette terre lui venait de sa tante, Mme Anne-Charlotte de Chalendar.



À la mort de L.-C. de Chalendar de la Motte, en 1777, sa veuve, « Dame Magdeleine de Chananeilles du Villard », vendit la terre du Revest à M. Antoine de Brignoles, écuyer de la ville d'Aix.



Le prix des terres nobles fut compté pour 27.000 livres, et celui des terres roturières, pour 3.000 livres. Les effets mobiliers furent estimés à 2.000 livres. On compta 1.600 livres pour « les épingles » (gratification que l'acheteur accordait à l'occasion d'une transaction).



Au décès de M. Antoine de Brignoles (1813), la seigneurie du Revest devint la propriété de sa fille, Catherine-Ursule de Brignoles, épouse de M. Jean-Louis Reymoneinc (?), capitaine « cartier-maître » du 19ème  Régiment d'Infanterie de Ligne.



À la mort de sa femme. M. Reymoneinc laisse de domaine du Revest à sa fille unique, Emée-Marie-Jeanne, épouse de M. Ramonet, docteur en médecine à Aix-en-Provence. À son tour, le docteur Ramonet vendra ses terres et le château à François Arène, qui fut maître du Revest en 1817.



En 1818, M. Jean-Joseph-François Allègre achète à Etienne-François Arène ce qui restait des terres de l'ancien fief et le château. Cette vente fut résiliée.



Le 15 juin 1825, M. Ramonet vend à M. Jean-Joseph-François Allègre « le restant du domaine » : la maison du four située dans le village... et les masures du haut du village.



Au décès de M. Allègre, ses deux fils se partagent les deux lots constitués par les terres et dépendances de l'ancienne Seigneurie (1866). Daniel et Marin Allègre effectuèrent de nombreuses réparations au château, aux bergeries et aux maisons du haut village.



De partages en partages, de successions en successions, de ventes en ventes, la terre du Revest fut morcelée au fil des ans. L'importante seigneurie se voyait démembrée, les parcelles de « bosques », celles « complantées de vignes et d'oliviers » étaient, au gré des acheteurs et vendeurs, rattachées ou détachées du domaine ou d'un autre.



Le parc même avait vécu. Seule, l'intarissable petite fontaine aux deux vasques (près du lavoir communal) répète aux promeneurs les mêmes choses  qu'autrefois.



Confrérie de la Miséricorde



À de ce qui existait dans clés villes et des villages plus importants, naquit une société de charité pour soutenir les désespérés, soigner les malades, aider les pauvres.



L'action de cette association, dite « Confrérie de la Miséricorde », débuta au 17ème  siècle au Revest. Cette œuvre était en étroite liaison avec son homonyme de la grande cité voisine. L'apostolat de ces deux communautés fut parfaitement profitable aux malheureux.



Il suffit de compulser, aux Archives Communales, le dossier de « l'Hôpital de la Miséricorde » pour constater la générosité de tous les donateurs. Dans une lettre du 29 novembre 1742, M. le curé du Revest, l'abbé Teissère, écrivait à M. Artigue, secrétaire de la Confrérie de la Miséricorde à Toulon, et lui accusait réception de 34 livres 16 sols, en le remerciant de la prochaine fourniture de 12 cannes de drap.



En feuilletant les pages qui relatent l'histoire de cette fondation, nous constatons les besoins des « pauvres honteux » : médicaments, habits, nourriture. Nous pouvons aussi lire les noms des différents recteurs et trésoriers du bureau de la Confrérie.



Penchée sur les douleurs quotidiennes, la Confrérie de la Miséricorde sut se montrer efficace pendant la terrible épidémie de 1720. La peste sévissait avec, à son actif, les plus désastreuses victoires. La Confrérie était là. Elle prit les initiatives les plus audacieuses et les plus courageuses. Le père Zacharie, capucin, et l'archevêque d'Aix donnèrent 300 livres chacun. Les factures sont là, qui attestent l'achat de remèdes et de la «   chox  »  (chaulx)  nécessaires pour lutter  contre le fléau.  Un  certain nombre de liaisons avec Toulon furent assurées par des voituriers qui « furent payés pour leurs activités ». Christophe Barbaroux, boucher, avait fourni le 16 juin 1721 pour 162 livres 10 sols de moutons et brebis distribués aux pauvres et malades. Thomas Gauthier, trésorier de la Confrérie, fit le certificat autorisant le remboursement de cette somme à Christophe Barbaroux.



C'est dans « l'Enclos », dit « la Fouilloy » (dépendant du domaine de la Tourravelle), appartenant à M. Chaussegros, que les autorités de la province autorisèrent l'ensevelissement des victimes de l'épidémie.



Les membres de la Confrérie assistèrent et transportèrent les morts.

La Confrérie de la Miséricorde possédait aussi un établissement hospitalier au Revest. De très nombreux malades y furent hébergés et soignés. Cet établissement peut être situé sur l'actuelle propriété du docteur Mouttet, dont un bâtiment est depuis toujours désigné sous le nom de « la Maladrerie » ou « la Léproserie ».



L'œuvre de la Confrérie se poursuivit aux 18ème et 19ème siècles. De très nombreux dons continuèrent d'être versés, apportant, par leur judicieuse répartition, le réconfort espéré. Dès le milieu du 19ème  siècle, cette fondation devint le bureau de bienfaisance de la commune.



Cette association charitable, appelée aussi « l'Hospice du Revest », ne méritait pas l'oubli.





Histoire religieuse







Deux bénéfices étaient fondés au Revest avant le XVe siècle : les Pénitents Blancs célébraient leurs offices dans la chapelle Saint-Jacques, près de la tour. Par testament, Sibille, dernière descendante des seigneurs de Toulon, leur laissait une somme d'argent.



En 1536, Antoine Panoty, dont on possède les bulles de la collation, était nommé recteur de la chapelle Saint-Jacques. Des réparations furent faites à cette chapelle en 1634 ; chaque habitant fut taxé d'un capage de 1 livre 4 sols. De cette chapelle, il ne reste que l'encadrement de la porte, enchâssé dans le mur de soutènement d'une calade. Quelques squelettes ont été mis au jour (1961) à quelques dizaines de mètres seulement de l'entrée de l'édifice.



L'autre bénéfice était la chapelle de « Notre-Dame de Pitié », appelée aussi « Notre-Dame de Peiloun », et dont on peut voir les ruines sur une hauteur à l'ouest du village. On y allait en pèlerinage le 8 septembre. Cette chapelle appartenait aux Pénitents Gris.



C'est le 29 janvier 1674 que fut commencée l'église actuelle. De très nombreuses sommes d'argent furent empruntées pour couvrir les dépenses. Le seigneur du Revest et d'autres habitants avancèrent les fonds nécessaire. L'église est sous le titre de l'Assomption, saint Christophe et saint Jacques en sont les patrons.



Construite en forme de croix latine, elle fut achevée en 1679. Sur le côté droit, nous trouvons la chapelle Saint-Joseph, puis la chapelle Saint-Sébastien et Saint-Christophe dans le transept. La grande statue de saint Christophe est un don de la famille Martinenq (M. Martinenq fut nommé curé du Revest le 3 juillet  1864).



Sur le côté gauche, nous avons la chapelle des Ames du Purgatoire et celle de la Sainte Vierge (autrefois Notre-Dame des Neiges) dans le transept; à l'angle du transept et de la chapelle des Ames du Purgatoire, une très simple chaire, sur les panneaux de laquelle sont sculptas les quatre évangélistes. Le chœur possède un maître-autel qui date de 1348. Dans l'abside, nous trouvons, occupant l'emplacement de vitraux, deux grandes statues de saint Vincent de Paul et de saint Ferdinand, roi du Portugal (consacrées en 1877, par Mgr Terris, évêque de Fréjus et Toulon). À l’emplacement des ces niches existaient primitivement deux fenêtres.



Lors des réparations effectuées aux fenêtres de l'église, en 1847, «des vitres colorées» furent placées et, le jour étant jugé insuffisant, il fut décidé de percer ces deux ouvertures.



Entre 1847 et 1877, elles furent une fois encore obstruées. Entre ces deux statues, nous avons une peinture célébrant le vœu de Louis XIII. À droite, les armoiries de Mgr Terris ; à gauche, celles de Pie IX. Deux tableaux sous ces blasons, peints par M. le curé Chabert, en 1711. La tribune actuelle est de construction récente. Elle a nécessité la destruction de deux autels que remplacent, à droite et à gauche, deux peintures. À gauche, une grande toile représente, en pied, saint Cyprien et saint Clair ; sur la droite une peinture dite de l'école espagnole. Son cadre a malheureusement été scié pour mordre dans la moulure de la tribune. Au-dessus de l'autel de saint Joseph, une grande toile représente la mort du saint qui, allongé, habillé de bure, tient une bible. Les personnages qui l'entourent sont habillés en costumes modernes. Très beau cadre. Une bannière processionnelle provenant de ia chapelle Saint-Jacques sa trouve dans l'église. Un très beau Christ en majesté semble provenir de la même chapelle, un important vitrail en parfait état se trouve au-dessus du porche, à l'intérieur de l'église. Il est surmonté des armoiries de la Chartreuse de Montrieux.



La sacristie possède un très beau meuble (1379 (?)) dont la porte finement sculptée, dans l'esprit d'un canopé, est d:une grande pureté. Plusieurs chandeliers proviennent de dons. Ils portent gravés les millésimes attestant l'époque où ils furent offerts. L'un d'eus porte : « S T R 1769 », un autre est marqué : « Saint Joseph 1779 ». Il existe aussi une série de chandeliers et crucifix d'autels à branches fleurdelisées. L'église possède de très nombreuses statues bustes-reliquaires magnifiquement dorées. Deux ou trois ex-voto naïfs ornent la chapelle de la Très-Sainte Vierge.



À la Révolution, la première délibération communale concerne le culte et consiste en la publication officielle du décret ordonnant l'emploi de l’écharpe tricolore dans les cérémonies religieuses.



Le 5 décembre 1790, le curé Gastinel prêta serment dans l'église, face aux autels, sous les drapeaux de la Garde nationale. Ce fut le 16 janvier 1791 que le vicaire vint, après la grande-messe, prêter serment.



Le 22 juillet 1792, on s'en prit à la petite cloche de la chapelle Saint-Jacques qui fut dirigée sur la Monnaie de Marseille.



Le 13 janvier 1893, on vota un crédit de 98 livres pour réparer le toit de l'église actuelle.



Sur ordre du district du Beausset, l'église servit de temple au culte de la Raison.



Si la période antérieure à la Révolution est peu riche en archives religieuses, la lecture des actes paroissiaux et les registres des délibérations du Conseil de Fabrique nous donnent de nombreux documents pour la période contemporaine.



Les chaises de la paroisse furent mises en adjudication le 25 septembre 1836. La chaisière intéressée ne fit aucune redevance à l'église. Elle fut poursuivie en justice. Le Conseil de Fabrique eut gain de cause le 22 mars 1838.



En 1846, on délibéra et on vota au Conseil de Fabrique les fonds nécessaires à la refonte de la vieille cloche. Par souscription, on remit la somme de 654 francs. C'est M. Toussaint Sabatier, fondeur, rue Bonne­tière, à Toulon, qui se chargea de « prendre la matière de la vieille cloche au prix de 2 francs le kilo, de fondre cette matière et de confectionner une nouvelle cloche de même poids, moyennant le prix de 3 francs 25 le kilo ». Le Conseil de Fabrique s'engageait à fournir le bois nécessaire pour la fonte, les briques, chaux et sable, le charbon et la main-d'œuvre nécessaires pour confectionner ce fourneau.



La réparation du maître-autel, qui fut décidée le 2 janvier 1848, coûta 1.600 francs.



En 1849, on vendit de vieux objets dorés appartenant à la Confrérie de la Sainte Vierge pour la somme de 135 francs. Cette somme fut affectée au remboursement des frais occasionnés pour la réfection du maître-autel.



Dans la séance du 1er décembre 1850, le Conseil de Fabrique prit d'importantes décisions concernant l'administration religieuse et le règlement de certaines cérémonies:

1.  –La Fabrique cède spontanément, comme par le passé, ses droits à M. le Curé de la paroisse sur les honoraires des messes hautes dans toutes les classes.

2.  

3.  - Elle alloue, à partir du 1er janvier 1851, la somme de cent francs pour indemniser M. le Curé des honoraires qu'il percevait à ces mêmes enterrements, avant la promulgation du nouveau tarif. Cette somme lui sera payée par portion égale et par trimestre chaque année.

4.  - À dater de ce jour (1er décembre 1850), la cire des enterrements sera  exclusivement fournie  par  la  fabrique  de la paroisse  du  Revest, au taux (?) francs le kilogramme.

5.  - Le partage de la cire s'effectuera selon le décret du 10 décembre  1806.

6.  - Le prix des enterrements sera désormais perçu par avance par le trésorier de la Fabrique.

7.     - Lorsque la  Confrérie  des  Pénitents sera  demandée  aux funérailles par la famille du défunt, l'enterrement sera toujours de troisième ou quatrième classe, au gré des parents, et dans ce cas encore il sera nécessairement fait abstraction de la taxe qui revient, indépendamment du tarif, à ladite Confrérie et des cierges qu'il plaira aux parents de lui donner.



Le 8 décembre 1851, les marches des autels furent réparées par un menuisier de Toulon. Le marchepied en noyer du maître-autel et deux tabourets pour les clercs furent commandés. On fit aussi construire une niche pour la statue de saint Maur et une autre pour celle de saint Joseph. L'autel de saint Maur fut réparé — huit bancs furent commandés pour les enfants du catéchisme. Une porte fut placée derrière le maître-autel, pour «sauvegarder l'huile de la lampe».



Les boiseries (côté sacristie) furent construites et mises en place, de même que les sièges des célébrants, du chantre et le banc de « l'œuvre ».



Dans le registre des délibérations du Conseil de Fabrique, on trouve (janvier 1852) une liste d'objets dont l'église du Revest avait besoin : un missel romain (commandé à Lyon) ;  tapis en laine pour le maître-autel ; un bouquet artificiel ; canon sous verre ; baguette dorée pour les autels de saint Eloy (sic), sainte Anne et la Sainte Vierge ; redorer le buste de saint Roch et de saint Joseph, etc. Le 15 janvier 1852, le Conseil de Fabrique adoptait un règlement très sévère s'appliquant au sacristain sonneur ;



Le Conseil de Fabrique délibère régulièrement et élit son bureau ponctuellement. Le 23 avril 1854, Séverin Sauvaire est nommé président, Antoine Vidal est secrétaire. André Vidal est membre du bureau et accepte les fonctions de trésorier.



En juillet 1854, une souscription est ouverte pour permettre les réparations urgentes. L'évêque de Toulon doit venir visiter l'église et confirmer les enfants ; les murs sont lézardés, les peintures s'effacent. Cette souscription fut interrompue par l'épidémie de choléra qui sévissait à Toulon et par un « violent mal au pied » dont fut atteint M. le curé Jehan. On put réunir 273 francs. Il y avait pour 326 francs de réparations. M. le curé Tampon entra en fonction en septembre 1854.



En accord avec la législation en vigueur, la municipalité offrait une indemnité de logement au curé en fonction. Dans une de ses délibérations du 11 mars 1855, elle décida la construction d'un presbytère. Cette construction était à l'étude depuis 1850. Le 23 juillet 1850, le Conseil de Fabrique avait voté 300 francs comme somme allouée au projet de construction d'un presbytère. De son côté, en mars 1855, le Conseil de Fabrique votait 100 francs comme seconde participation. Le 29 septembre 1857, le presbytère, attenant à l'église et construit par la commune, fut mis à la disposition de M. le curé Tampon.



Composée d'une cuisine, d'une salle à manger, d'un « salon de compagnie » et d'un petit jardin, cette maison est actuellement le siège du « Cercle Revestois ». M. le Curé demanda qu'un petit hangar et des latrines fussent construits dans le jardin. Cette demande ne fut pas acceptée, les finances municipales ne permettant pas de semblables dépenses.



Une mission fut prêchée au Revest, en 1858. Deux Maristes, le Père Gerin, supérieur de la Maison de Toulon, et le Père Teinier, s'installèrent au Revest pendant vingt-cinq jours.



Très protocolairement, les membres de la Société Sainte-Cécile et ceux de l'Association de Saint-Roch rendirent aux missionnaires leur visite. Les espoirs de M. le Curé furent vite déçus. Peu ou pas de Revestois aux Sermons, les habitants de l’Hubac et de Saint-Pierre-les-Moulins étaient les plus nombreux aux cérémonies.



Cette indifférence des Revestois pour les choses religieuses était due, prétendait-on à l'époque, au fait qu'il y eut pendant de très nombreuses années au Revest des prêtres italiens qui « ignoraient la langue de nos braves paysans  »...



Le 15 juin 1861, M. le curé Segallon déposait dans le socle de saint Christophe les reliques du saint. L' « authentique », écrivait-il, se trouve derrière le reliquaire (buste reliquaire).



En avril 1866, une paire de pendants, offerte par une dame, fut mise en loterie, le Conseil de Fabrique ayant besoin d'une certaine somme d'argent.



Par délibération du 29 juillet 1866, le Conseil de Fabrique décida de refaire le carrelage de l'église, l'enduit des murs, la construction d'un hangar dans le prolongement du clocher. Ces dépenses s'élevaient à 6.800 francs.



En juin 1867, nouvellement réparée, l'église est inaugurée par M. le doyen Rouvier, curé de Saint-Louis. Les motifs décoratifs visibles à l'intérieur de l'église datent de 1867 et ont été exécutés par M. Sabatier, de Marseille.



Dans la nuit du 19 au 20 avril 1878, les troncs de l'église furent fracturés. Le ciboire du maître-autel ayant été placé dans le tabernacle de l'autel de la Sainte Vierge, il n'y eut pas de sacrilège.



La Chapelle Sainte Rose

ou Notre-Dame de la Santé





Jean de Noble, seigneur du Revest, fut consul de Toulon en 1680, 1685 et 1692. Les fonctions qu'il exerçait à Toulon l'amenèrent à résider au château de l'Eygoutier. Il fit construire un tombeau dans la chapelle de cette demeure qui était dédiée à Notre-Dame de la Santé et à sainte Rosé. Cette chapelle, qui dépendait de la seigneurie du Revest, était située sur la rivière de l'Eygoutier. Jean de Noble et sa femme y furent enterrés.



Une plaque millésimée portant en latin. : « Dans l'espérance d'une résurrection future, ici repose Jean de Noble, seigneur du Revest, qui a dédié à la Vierge Marie, mère de Dieu, ce temple sacré, construit et doté à ses frais », fut brisée pendant la Révolution. Elle était surmontée de l'écusson gravé de Jean de Noble.



La statue de la Sainte Vierge fut détruite. Seul, le crucifix de l'autel fut sauvé par M. Liced (?) qui était attaché à la propriété comme jardinier.



Une fondation de 90 livres par an était faite au recteur de la chapelle par les seigneurs du Revest, jusqu'en 1777. À cette date, les héritiers de Jean de Noble se réservèrent le droit de continuer à verser cette rente annuelle. Cette chapelle a été restaurée après la tourmente révolutionnaire.





Les journées révolutionnaires

au Revest-les-Eaux

25 mars 1789 – 2 décembre 1851



Toulon, Hyères et Brignoles pour le 27 mars 1789, les délégués des Trois Ordres devaient siéger séparément et nommer (après avoir rédigé et réuni les trois cahiers de doléances en un seul) leurs députés aux États Généraux.



À Toulon, dans l'après-midi du 23 mars, une foule nerveuse et décidée envahit la salle des délibérations de la mairie où siégeaient les soixante-seize délégués élus par les diverses corporations. Des cris de mort furent poussés par les manifestants armés. De nombreuses exactions furent commises contre MM. Mourchou, Baudin et de Villebranche, ancien maire.



Les impôts successifs sur les farines amenèrent la population dans la rue. L'agitation gagna les proches environs (Le Luc, Brignoles). Dans les départements voisins (Marseille, Manosque), des émeutes éclatèrent.



Le 25 mars 1789, une effervescence inaccoutumée règne au Revest. L'insurrection éclate. Conduite et bien préparée, la foule sait où elle va. Le  château  est  attaqué.



Antoine de Brignoles, seigneur du Revest, écuyer, se trouve dans sa demeure aixoise. Dix-neuf hommes du village, chefs du mouvement, enfoncent les portes et pénètrent avec leurs troupes. Tous les meubles qui s’y trouvent sont portés sur la place de « l'aire publique » et incendiés.



Seul un coffre Renaissance, finement sculpté de feuilles d'acanthes, aux panneaux séparés par d'élégantes colonnettes, fut sauvé de l'incendie



À l'extérieur, on s'en prit aux têtes des éperviers qui ornent les deux tourelles d'angle de la façade principale. Quelques coups de masse eurent vite fait de décapiter ces inoffensifs oiseaux.



Une information fut ouverte. M. de Franc, conseiller au Parlement de Provence, fut chargé de l'affaire. Il fit arrêter et incarcérer à Aix-en-Provence les dix-neuf responsables de cette manifestation. Ces hommes durent leur libération à une incursion des Marseillais qui ouvrirent les portes de la prison. Rentrés chez eux, leurs méfaits furent couverts par des lois d'amnistie pour les uns et par la prescription pour les autres. Plusieurs d'entre eux vivaient encore au Revest en 1821.



On insista beaucoup sur cette affaire au cours d'un long procès qui opposa, en 1821, la famille Allègre à la municipalité du Revest.  Dans cette interminable suite de débats, il s'agissait d'établir les droits des propriétaires du château sur l'eau de la fontaine qui s'élève devant l'église. Aucun titre de propriété n'ayant pu être fourni (ils avaient disparu lors de l'émeute), seules les lois en vigueur furent retenues.



En 1791, les gages du « greffier et régent des écoles » étaient de 436 livres par an. Au 4 Ventôse An III, le citoyen Maillet n'avait pas été payé depuis deux ans. Il était « secrétaire-greffier des écoles ».



Lors du coup d'état du 2 décembre 1851, de nouvelles manifestations eurent lieu au Revest. La foule, cette fois, s'acharna sur la « maison commune ». La mairie, alors située dans l'immeuble occupé aujourd'hui par des services des Postes et Télécommunications, fut attaquée. Le modeste mobilier ne fut pas épargné ; les archives eurent à souffrir de la hargne populaire. De nombreuses et précieuses liasses de documents, parchemins vénérables furent incendiées. Apeurés, les habitants vécurent les mêmes scènes qu'en 1789.



Si proche de la grande ville, l'arrière-pays toulonnais peut demain jouer un rôle de premier plan dans une véritable organisation touristique. On peut s'étonner, en même temps que se féliciter, qu'il ait échappé jusqu'ici aux idées « originales » des extravagantes entreprises modernes.



Tous ceux qui sauront se contenter des promenades et des paysages de la profonde vallée seront les plus sûrs agents du vrai tourisme : celui qui « donne à voir » en même temps qu'à penser.





Tourris





Situé à 10 kilomètres au nord-est de Toulon, le hameau de Tourris (turris : les tours) nous est révélé pour la première fois  en 1084 dans une bulle donnée par Grégore VII. Appelée aussi Vieille-Valette (Bourg « de Vallé », vestige de toponymie gauloise).



Tourris doit son nom au fait qu'il fut de tout temps un lieu de repli et un poste d'observation de première importance.



Ce fut d'abord un réduit gaulois. Un poste romain s'édifia autour de ces constructions. Plusieurs maisons furent ensuite élevées à l'abri de ce « mirador ». De solides murs d'enceinte abritaient le tout, et leurs ruines, encore robustes, encadraient des portes largement ouvertes.



L'ancienne demeure romaine de saint Jean de Tourris, au milieu du 18ème  siècle, dépendait du domaine des comtes de Provence, en dehors de tous autres seigneurs, comtes ou barons. Tourris fut très souvent l'objet des convoitises des Revestois et des édiles de la Valette. Il eut pendant très longtemps ses syndics élus : en 1639, les consuls de la Valette furent nommés syndics de Tourris, à la demande des habitants eux-mêmes. Les consuls du Revest avaient adressé un ultimatum à leurs voisins.



Les très nombreux combats des XIVe et XVe siècles y amenèrent une population apeurée. Les incursions des barbaresques accrurent ces replis.



En 1262, Charles II, comte de Provence, et son épouse Béatrix cédaient tous leurs droits sur le « Bourg de Vallé » aux nobles Isnard et Reforciat. Ceux-ci abandonnaient les droits qu'ils possédaient à Toulon.



Les relations entre Toulon et les châteaux voisins ne furent pas toujours très cordiales. En 1395, Les consuls de Toulon désignèrent « les Nobles Vincent et Antoine et Messires Antoine et Jacob » pour qu'ils se rendent auprès du sénéchal et du Conseil Général pour régler au mieux «la paix qui doit avoir lieu entre la ville et les châteaux de Tourris et du Revest...».



Le 9 juillet 1447, les consuls de Toulon engagent des pourparlers avec les seigneurs d'OlliouIes pour obtenir le libre accès des pâturages de Tourris. Afin de gagner cet avantage, la ville consent à payer tous les frais que M. d'OlliouIes a pu faire.



Devant les menaces que faisait peser sur leur ville la présence de la flotte turque, les consuls de Toulon écrivirent au château de « Turitz » (Tourris) de se « rendre à Toulon et de se tenir prêt au premier commandement du Bailli » (1510).



Après la mise à sac (1536) des terres environnant Toulon, c'en était fait de Tourris. Tout y était détruit. De très nombreuses années passèrent avant que le hameau et la seigneurie ne reprennent le visage de la vie.



C'est perpendiculairement à la chapelle Saint-Jean, de Tourris, élément premier de l'ensemble visible aujourd'hui, qu'au début du XVIème  siècle le seigneur de Tourris entreprit la construction du château actuel.



Au début du XVIème  siècle, toutes les terres de Tourris qui n'étaient pas soumises aux tailles furent attribuées au Revest et à la Valette. La seigneurie fut ainsi divisée. Cette répartition nécessitait une application toute spéciale des règlements en vigueur. Les propriétaires du fief défendirent leurs droits. Les prérogatives du seigneur de Tourris étaient sauvegardées (arrêt de la Cour des Comptes, 1731, 1731 et 1759). La seigneurie comportait le droit de haute, moyenne et basse justice directe universelle. Ce droit, qui apparaît à la lecture de plusieurs titres, est très particulier.



Comme dans tout le pays voisin, l'eau jouait à Tourris un rôle considérable et permettait, en plus de l'irrigation des terres, l'implantation et la marche de petites fabriques et industries. En 1738, la ville de Toulon payait 757 livres à M. Rimbaud, procureur du roi « en l'Amirauté de cette Ville » ; cette somme représentait le prix des arbres que la communauté lui avait demandé d'arracher dans son domaine de Tourris, « comme trop voisins du canal des eaux des moulins ».



La famille de Vintimille fut la première à posséder la terre de Tourris.



En échange de quelques biens et titres seigneuriaux qu'il possédait à Ollioules, Jean Chautard acquit la seigneurie de Melchion de Vintimille.



Originaire de la ville d'Aix, la famille Nas occupe une place importante dans la liste des différents propriétaires de Tourris. Simon Nas, second consul d'Aix en 1494, eut :

— Henri de Nas, second consul d'Aix, en  1529 ;

— Louis de Nas, chevalier. Il fut un des plus brillants capitaine de son temps.



Il se signala tout particulièrement en Corse, sous les ordres du maréchal de Ternes. Il fut, par sa brillante compréhension des données du combat, l'artisan de la prise de Bonifacio, occupée par les troupes génoises, le 20 septembre 1553. En 1551, il avait épousé Catherine Chautard, fille de Jean, seigneur de Tourris.



C'est par cette union que la terre de Tourris fut définitivement acquise à la famille de Nas. Louis de Nas et Catherine Chautard eurent Jean-Baptiste. Jean-Baptiste de Nas est cité dans l'Histoire des Guerres de Flandres. Digne successeur de son père dans le métier des armes, il tomba devant  Anvers.



Il avait épousé (1568) Claude de Thomas, fille de Jacques, seigneur de Sainte-Marguerite. Ils eurent Bernardin de Nas, marié en 1591 avec Élisabeth de Marin. Bernardin et Élisabeth de Nas eurent François et Jean-Baptiste II. François épousa, en 1642, Victoire de Saqui qui lui donna Louis de Nas. Ce dernier épousa Claire de Martini en 1670.



La terre de Tourris passa ensuite dans la famille Rimbaud.



Le 1er octobre 1793, l’armée Lapoype, qui vient de quitter ses positions au pied du Coudon, se porte en renfort de l'armée du général Cartaux ; 1.800 hommes contournent alors le Faron et traversent les terres de Tourris.



La chapelle Saint-Jean de Tourris desservit pendant de longues années le hameau et les bastides environnantes. Cette chapelle fut autrefois un lieu de pèlerinage où Revestois, Valettois et Toulonnais se rendaient chaque année avec ferveur. Une amusante autant que malencontreuse bagarre entre pèlerins du Revest et de la Valette mit fin à cette traditionnelle procession.



Il ne reste que très peu d'archives sur Saint-Jean de Tourris. Une confrérie de Pénitents y existait encore en 1832. M. Marzelini, recteur, nommait cette année-là les prieurs et prieuresses de Saint-Jean. C'était Michel Meiffret, Jacques Meiffret, Victorine Hermitte et Suzanne Meiffret.



Au XIXe siècle, de très importantes réparations furent effectuées à la chapelle. On acheta une chasuble, on mit une nouvelle nappe à l'autel de la Sainte Vierge. On acheta un cadre pour un tableau, la toile du tableau, du plâtre... Le jour de la Saint-Jean, on acheta et on « tira les boîtes ». Toutes ces dépenses ne furent pas du goût du recteur qui les trouva «  inutiles  ».



À l'heure où une fois encore, de par sa situation abritée. Tourris est amené à servir d'important point d'appui à la défense de Toulon, il n'apparaît  pas  déplacé  d'en  rappeler  rapidement  l'histoire.

Pour en venir à l'orthographe actuelle, nous nous reporterons à une lettre de M. B. Durand à M.Mareuse, du 27 octobre 1923.



Après avoir souligné combien les noms propres étaient « massacrés » par les « notaires ignorants et les graveurs de cartes », M. Durand expose toutes les formes rencontrées sur les textes anciens. Plus de dix orthographes différentes. Pour l'orthographe moderne, « il provient d'une confusion et d'une fusion du nom propre avec la préposition de qui le précédait généralement à une époque ou l'apostrophe n'était pas encore d'un usage courant. Quant à 1' s final, dont on agrémente aujourd'hui le mot, je n'en vois aucune explication, ni logique, ni étymologique, ni esthétique... Le malheur est que cet s malencontreux a fait croire que Dardenne était un pluriel, d'où le dernier contresens Vallée des Dardennes. Il convient donc d'écrire Vallée de Dardenne, ou mieux encore, si vous ne craignez point une pointe d'archaïsme, Val d'Ardène... » (Revue des Études Anciennes, tome 27, 1925).



Place forte de l’arrière-pays toulonnais, le « Castrum de Vallis Ardena » fut le lieu de repli d'une peuplade établie sur les bords de la Valdas (l'As, le Las). Proche des Commoni (établis au Revest, peut-être de la même famille), elle communiquait avec sa voisine et les établissements similaires de la côte par code. Complexe puzzle de l'architecture défensive méditerranéenne, solide point d'appui de la défense toulonnaise, les caractéristiques militaires et religieuses, voire conventuelles, y dominent.



La tour celto-lygienne (au côté du dixième moulin) est l'élément premier autour duquel le tout fut composé. Magasin d'armes et de marchandises, cette tour, par son architecture et l'épaisseur de ses murs, était inexpugnable. Un mur d'enceinte clôturait l'ensemble. Les vestiges de cette muraille ont dû servir à la construction du dixième moulin et du « Paridon ». Par ses dimensions, la tour du Val d'Ardène est la fidèle jumelle de sa voisine (Revest). Du fait de réparations, elle a été légèrement arasée sous le toit. Diverses modifications ont transformé l'intérieur. Une citerne a peut-être existé en sous-sol de Tune des trois ailes du bâtiment, encore inexplorée.



Les auteurs qui se sont penchés sur le testament de Sibille, dame de Castellanne et de Trets, ont généralement mentionné la donation par celle-ci du Revest et de Val d'Ardène aux Chartreux de Montrieux.



La présence d'un ordre religieux à Val d'Ardène a fait naître une tenace  légende.  On  a   en  effet longtemps  parlé  des   Templiers  comme avant   possédé  ce   fief ;   la  proximité   de   leur   établissement   des  Routes (le Temple) a contribué à répercuter cette erreur.



À l'intérieur de l’enceinte fortifiée, dominant les rares constructions qui s'élevaient en contrebas, une église fut bâtie. Une église de campagne à une nef, à chevet plat avec crypte.



Vaste carré, l’ensemble de la construction actuelle enferme une cour plantée d'un élégant platane, Solidement accrochées à une couche de travertin, les fondations de la bâtisse sont renforcées par des piliers faits de conglomérat de mortier et de pierres meulières. Ces piliers ou pieux sont très nettement visibles au fond de l'excavation ouverte dans la cave. Ils semblent disposés à intervalles réguliers.



Longue pièce voûtée en plein cintre, avec un arc doubleau approximativement en son centre, la crypte est construite en moellons de- petit appareil, d'une belle couleur grise, plus longs qu'épais, reliés par un mortier rosé. L'arc doubleau repose sur un entablement légèrement apparent.



Une seule ouverture sur la façade sud-ouest éclaire cette magnifique pièce sobre, d'une prenante simplicité. Transformée en cave viticole, la crypte est dallée de carreaux brun-rouge.



L'église est voûtée partie en plein cintre, soutenu par un arc doubleau, renforçant les faiblesses ; partie en voûtes d'arête d'angle et coupée par un mur très légèrement maçonné épousant les sinuosités de l'ensemble. Les murs ont environ un mètre quarante d'épaisseur et comportent un double blocage avec pierres de taille, sous un revêtement de pierres et briques très divers, dont le mortier d'un joli rosé est de solide qualité. D'étroites et hautes ouvertures, certaines bouchées, apportent une lumière blanche et discrète. Le pavement est fait de valets ronds ; quelques bandes de pierre plus longues et plates marquent dès Feutrée, par la cour, des emplacements précis. Par une porte, on accède à une haute « tour-clocher » percée de meurtrières. La base rectangulaire s'élève, lourde et solide, jusqu'aux ouvertures des côtés, emplacement des  cloches,  autrefois.



Plusieurs fois transformée, l'église fut affectée aux usages les plus divers: remise, hangar, écurie. Une récente rénovation de la plus grande partie a redonné à l'ancienne église de campagne — à l'ancienne chapelle Saint-André — sa grandeur d'origine.



La tour celto-lygierine, la crypte, l’église sont les éléments premiers de  cet ensemble.



Tous les propriétaires du fief apportèrent des modifications au fur et à mesure qu'ils relevaient les ruines des attaques, des sièges, des incendies.



On pense, alors et chaque fois, à réunir le tout, à « fermer » l'ensemble. De ce fait, l'épaisseur des murs est partout très irrégulière. Toutes les façades portent de grandes fenêtres qui furent tour à tour bouchées ou simplement réduites. Ici et là, des œils-de-bœuf bouchés, façonnés, remodelés. En plus d'un endroit, de larges ouvertures plus hautes que larges comportant des grilles de fer plat.



On entrait par-derrière, face au mont Combe, par cette belle porte aux pierres magnifiquement agencées que fermait une grille ; les gonds sont encore là et aussi les pièces de garde.



A l’intérieur, on va de surprise en surprise. Plafonds aux caissons discontinus, large voûte bouchée et diminuée entre le vestibule et le salon. Fans de murs apparents face à rentrée de la crypte, tin large et bel escalier conduit au premier étage. Éclairant les marches, une fenêtre regarde Faron, bel encadrement de pierres. Sur un premier palier, porte d'entrés dans le magasin voûté de la tour celto-lygienne. Sur toute la largeur du vestibule le long palier donne accès à ce qui était la salle des délibérations de la communauté de Toulon. Par ici, c'est dans « la grande salle » que toute la richesse du silence peut le mieux être goûtée. Au-dessus de l'église, une belle pièce voûtée. Tout à côté, les « magnaneries ». Comme aux greniers où la double dimension des murs est éclatante, ces hautes et grandes pièces témoignent des méfaits du temps et des gens.



À côté du château était « le Four ». Cette pièce robuste, aux murs épais, a été incorporée aux successives constructions appelées aujourd'hui «   les  Marronniers   ».



Après la résistance opposée aux assauts et sièges des barbaresques, Guillaume de Tarente aurait dirigé la reconstruction des défenses de Toulon et relevé les ruines des enceintes fortifiées du Revest et de Val d'Ardène (12ème siècle).



En 1374, Raymond de Montauban s'empare de Val d'Ardène.



De nombreux combats se déroulent en 1592, sans épargner la vieille demeure.  Le  duc  d'Epernon  s'empare   du   château,   y   capture   Honoré de Thomas qu'il ne remettra en liberté que moyennant une forte rançon.

François de Thomas avait 80 ans lorsque le duc de Savoie et le prince Eugène assiégèrent Toulon en 1707. Solide et distingué vieillard, il attendait l'armée ennemie dans sa maison.



Les hussards, en s'approchant, mirent le feu aux maisons voisines et l'arme au poing, se présentèrent à la porte pour la faire ouvrir. Sans s'émouvoir, François de Thomas dit à l'officier qui commandait cette avant-garde : « Tu feras bien non de me menacer, mais de me faire tuer ; sans quoi, des que ton prince sera arrivé, je te ferai pendre. ». Peu après son arrivée, le due de Savoie dit à François de Thomas : « Je vous sais bon gré de ne vous être pas méfié de mon arrivée. »



Le courage  surprenant   de   François  de   Thomas  le  fit   prendre   en grande estime par le prince Eugène qui, enfermé dans le château, n'eut plus pour son hôte fier et noble que des marques de déférente attention. (Nouveau Dictionnaire Historique, p. 530, tome VI, 1778.)



Commandé par Barville et Nisard, les sept bataillons portèrent pendant six heures les coups les plus redoutables aux ennemis retranchés dans la vieille maison, Ils enlevèrent la position ; les dégâts étaient considérables.



En 1793, les républicains attaquèrent la Garde Nationale cantonnée dans la vallée. Le Béal et les moulins furent l'enjeu de ces combats. Une fois encore, la demeure seigneuriale eut plus ou moins à souffrir de  ces luttes.

La nation acquit la Val d'Ardène comme bien d'émigré en 1794.



L'installation d'un hôpital pour la Marine préoccupe les édiles toulonnais dès 1793. Parallèlement, on songea à trouver un emplacement pour édifier un hôpital-hospice civil.



En 1795, l'aménagement du château du Val d'Ardène fut étudié. Des plans furent dressés. Diverses transformations étaient prévues. Les dispositions intérieures réclamées par les besoins du service montrent l'emplacement du fourrier, des blanchisseuses, du bureau du directeur. Un laboratoire d'analyses était projeté dans ce qui est aujourd'hui la cuisine de l'aile qui regarde Faron. Ce projet n'eut pas de suite.





La chapelle St. André

et les consuls de Toulon,

Seigneurs du Val d’Ardène





Bien avant 1640, la communauté de Toulon avait pris des dispositions pour acheter les moulins de la ville appartenant à des particuliers. Différents béals et canaux alimentaient la ville et les proches environs. Leurs   eaux   étaient   utilisées   pour   actionner   les   diverses machines des moulins.



Il y a, en 1430, « le béal qui vient des moulins de la Vaudas (Valdas, L'as, le Las) ». En 1604, on décide de « continuer les travaux du Béal de Bonnefoi ». En 1634, on met aux enchères « les eaux du béal pour l'arrosage  ».



Vingt ans avant l'achat au marquis de Thomas d'une partie de la seigneurie et des moulins et engins de la Val d'Ardène, les consuls de Toulon avaient des droits de visite sur la source et les eaux de la Foux.

Cette visite était, — ce deviendra une tradition — précédée d'une messe est suivie d'un repas. Le coût de ce banquet se retrouve dans les
archives  de  Toulon.   C'est   ainsi  qu'il  fut  de   44   livres   14   sous   pour l'année  1620.



C'est à partir de l'année 1639 que la communauté de Toulon s'intéresse aux « moulins et engins du sieur de la Val d'Ardène ». Une commission  fut nommée cette année-là pour aller traiter avec M. de Thomas. Les entretiens ayant été concluants, le 28 mai 1640, l'Assemblée Consulaire ratifiait l'acte d'achat, au prix de 50.000 livres, des moulins, partie de la seigneurie avec huit jours de juridiction, haute, moyenne et basse sur le fief. Tous les actes concernant cet achat furent remis aux Archives de la ville le 15 février 1644.



Dès 1643, les consuls de Toulon prirent le titre de seigneurs de Val d'Ardène, rendant hommage au roi pour cette seigneurie.



En 1677, 1689 et 1692, les consuls nommèrent des officiers de juridiction pour Val d'Ardène. Depuis 1640, le traditionnel repas de la Pentecôte réunissait dans les locaux consulaires du château les membres désignés pour la visite des eaux et canaux. Avant de se mettre au travail, les consuls assistaient à la messe dans la chapelle du château, aménagée en 1560 et inscrite dans l'ancienne église fortifiée dont nous avons déjà parlé.



Dès 1641, de graves difficultés surgirent entre le vendeur et les délégués de la ville de Toulon. Le 8 mai 1646, François de Thomas interdit l'accès de son château aux officiers de la communauté. Des procès eurent lieu, nombreux. Un modus vivendi semble avoir réglé les relations entre les deux parties.



Consacrée sous le vocable de saint André, la chapelle a pu être sûrement localisée dans la construction actuelle. La longue salle voûtée, inscrite au rez-de-chaussée des bâtiments de la façade ouest-nord, apparaît, par son architecture, la plus adaptée à la célébration du culte. Un ensemble harmonieux de voûtes élégantes confère à ce lieu une prenante spiritualité. Récemment restaurée, on y a découvert une pierre sculptée armoriée : l'écu représente les armes de M. Monier de Castellet, qui fut propriétaire et seigneur de Val d'Ardène jusqu'à la Révolution.



Transformée à travers les siècles en écurie, en étable et en entrepôt, cette pièce a retrouvé toute sa noblesse.



On s'est longtemps demandé pourquoi saint André fut donné comme patron à Val d'Ardène. L'explication est simple : un arrêt du Conseil d'État du 1er janvier 1730 fixait impérativement au 30 novembre la date des élections et les consuls choisirent comme patron le saint de ce jour.



Si les consuls de Toulon, seigneurs de Val d'Ardène, avaient leur chapelle, ils avaient aussi, dans l'importante demeure, des pièces où ils étaient chez eux. Cette partie du château se composait du jardin, dit « des orangers », et de l'aile parallèle à la noble montagne du Faron qui lui fait face.



La salle des délibérations se trouvait au premier étage ; on y accédait par le large escalier qui naît au rez-de-chaussée. Sur un long couloir capitonné de cuir, une porte s'ouvrait sur la grande salle, elle aussi richement parée. Deux fenêtres à balcon s'ouvraient sur le jardin. Ces deux fenêtres ont été légèrement bouchées. L'emplacement du balcon a été supprimé, mais les belles pierres à moulures de la base sont encore très nettement  apparentes.



Peu avant les premières marches du grand escalier, on franchit un  haut portique voûté. Au centre de la voûte, une pierre porte : « R 1730 ». Jusqu'ici, cette inscription fut considérée comme l'indication d'une restauration consécutive aux dégâts causés par les combats de 1707. Il nous apparaît qu'il faut y voir un désir des consuls de perpétuer l'arrêt du Conseil d'État fixant au 30 novembre de chaque année le joui de leur élection.



Le Martinet à poudre

et les Forges

du Val d’Ardène



Dès 1631, les consuls de Toulon envisageaient la construction d'un martinet à poudre au Val d'Ardène.



En 1648, les consuls de Toulon réglaient à M. Puget les frais qu'il avait engagés pour la surveillance des travaux de construction de la poudrerie établie à Val d'Ardène.



Le 9 novembre 1654, la communauté de Toulon approuvait et ratifiait l'acte concernant « le Moulin à Poudre » que venait de construire à Saint-Antoine le sieur Cristol Revest, de Brignoles.



C'est par délibération du 7 novembre 1671 que la communauté de Toulon décidait la construction d'un martinet à poudre « au-dessous du château de Val d'Ardène » ; par une nouvelle délibération du 9 décembre, les consuls étaient autorisés à acheter à M. de Thomas, seigneur de Val d'Ardène, une parcelle de terrain nécessaire aux installations du martinet que la communauté se chargeait de faire construire.



Le contrat de ce « Moulin à Poudre » fut passé à Marseille, en présence de M. le consul Bonnegrace ; MM. de Chabert et Serry, conseillers, ainsi que M. Gavoty, trésorier, assistaient à l'enregistrement des actes.



La construction de ce nouvel ensemble rendait inutile l'exploitation de l'établissement similaire qui existait à Rodeilhac (il s'agit sans aucun doute du martinet construit en 1654).



Par délibération du 6 février 1673, la communauté fut autorisée à vendre l'ancienne exploitation.



Nous pouvons, sans difficulté, situer les diverses constructions du martinet à poudre de Val d'Ardène, au pied du château.



Celles-ci s'élevaient entre l'actuel garage du neuvième moulin et les terrasses qui servirent à l'exploitation des septième et huitième moulins.



La manipulation et le stockage des tonneaux de poudres et salpêtres présentaient  des  dangers.



Le « Moulin à Poudre » explosa en 1684, occasionnant de très gros dégâts aux bâtiments et moulins environnants. Le château ne fut pas épargné. Des experts de la Valette furent choisis pour apprécier et évaluer les dommages subis par les propriétés de la commune de Toulon. Une délibération du 2 janvier 1685 examina les notes de frais présentées par les experts. Ce n'est que le 26 juin 1690 que furent étudiées, décidées et ordonnées les réparations. Celles-ci étaient acceptées en même temps qu'une  nouvelle   orientation  était   donnée   à  l'atelier.



Il fabriquera désormais « de grosses ancres ». Le « martinet de fer » était né. La « forge » aussi. Cette parcelle figure au « Livre Terrier » (cadastre) de la commune de Revest, au chapitre « Bien de la communauté de Toulon »; pour les années 1700, 1728 et 1768, elle y est désignée comme « une terre partie clos de muraille, dit la poudrière au quartier du Peiron, confrontant du levant la terre de la dame Dardène, du Midy la Rivière, du ponant le sieur Saviade, estimée une livre huitante petites y compris le coin du paroir à drap. »



Les événements de 1707 apportent à cet atelier une activité complémentaire, le monnayage de la « Dardenne ». Toute la Provence véhiculera le sobriquet dont seront affublés les avares : « Pito Dardenno ».



Employé très souvent pour désigner le « martinet à poudre » le mot « moulin » a fait croire et écrire à certains auteurs que la Dardenne avait été frappée au Moulin (dixième moulin attenant au château). On a même parlé du château. La proximité de ceux-ci peut faire comprendre avec quelle facilité cette erreur a pu être commise.



La reconstruction des installations semble avoir traîné en longueur, et la décision prise en 1690 d'y fabriquer « de grosses ancres » ne semble pas avoir été effective avant 1721-1722. Une entrave supplémentaire à la bonne marche de rétablissement sursit : la peste. Toulon et l'arrière-pays curent, on le sait, à souffrir durement de l'épidémie. La quarantaine imposée par les autorités avait conduit au Val d'Ardène le sieur Le Fébure, de Chassenay. Celui-ci arriva dans la journée du 8 avril 1721. Déjà atteint par le mal, il mourut le soir même.



Sur ordre de M. Hocquart, un inventaire des effets et biens de M. Le Fébure fut effectué par le sieur Renou, dont le frère qui se trouvait alors à Nevers était l'associé du disparu. Dans l'attente du retour de son frère (qui devait passer par Paris pour faire de nouvelles propositions pour l'exploitation de cette entreprise et sur celle de la fabrication des ancres qu'il assurait être en état de remplir à la satisfaction du Conseil), le sieur Renou fut chargé par M. Hocquart « du travail ordinaire des forges   ».



En 1724, « la Fabrique aux Ancres » est en pleine activité. Le directeur, M. Beauvais-Thomas, aide-major de la Marine, s'emploie avec beaucoup d'intelligence à développer l'affaire. Aussitôt, des procès surgissent, on sollicite l'intervention de Mgr le marquis de la Vrillère. On plaidera une année durant.



Cet atelier commence à travailler pour la Marine avec régularité vers 1746.



Ordonnée par un édit du 29 octobre 1709, la frappe de la « Dardenne » allait éviter les inquiétants désordres que le mauvais état des finances du pays n'aurait pas manqué de faire naître. Dès 1709, les troupes s'impatientaient du retard apporté au règlement des soldes. C'est donc faute de numéraire que le roi prescrit la frappe de ces « pièces de six deniers ou deux liards, dites d'Ardenne ou Dardenne, du nom du village auprès de Toulon, où il avait été établi un atelier auxiliaire affecté spécialement à la fabrication de ces pièces ».



Il fut souligné que ces pièces devaient être frappées très rapidement dans les ateliers d'Aix-en-Provence, Montpellier, La Rochelle, Bordeaux et Nantes. L'ensemble de l'émission devait représenter « deux millions de marcs de pièces de six deniers sans aucun mélange de fin, à la taille de 40 au marc, ou trois pièces par marc ».



Dans son édit, le roi constate que les frais de fabrication seront très élevés et que cette monnaie ne représentera pas ce qu'elle aura coûté. Sa Majesté sait la quantité de canons, boîtes, pierriers et autres pièces d'artillerie   qui sont entreposés   dans   ses   arsenaux.   Elle   ordonne   que « deux millions cent mille marcs de métal » soient livrés par les magasins de ces établissements aux commis qu'elle nommera. Les annexes de Val d'Ardène et de Gond (près La Rochelle) devaient, dans leurs ateliers, préparer les flancs des pièces. En réalité, ces deux succursales frappent aussi  des monnaies.



À Aix-en-Provence, comme à Val d'Ardène, la fabrication dura de 1710 à avril 1712. Une presse à balancier fut envoyée d'Aix à Val d'Ar­dène, où le sieur Allain, directeur de l'atelier, se chargera de « fondre et refondre la matière des canons, de la passer en lames, de la couper en flancs, de la recuire ». L'atelier de Val d'Ardène semble avoir cessé toute activité au début d'avril 1712. Le 16, en effet, la presse à balancier fut ramenée à la Monnaie d'Aix.



Sur le droit de ces monnaies on lit : « Louis XIIII Roy de (une fusée) France et de Nav ». Six L. couronnés et adossés deux à deux, disposés en triangle et cantonnés de lis. Au milieu du triangle se trouve la marque de l'atelier d'Aix, l'abréviation de et coetera ; sur le revers, une croix fleurdelisée formée de quatre arcs entrelacés et la légende : « Six deniers de France (un cœur) » et le millésime de l'année de la frappe.



Le cœur est le différent de Marc Piellat du Picruet (ou du Piguet) qui fut directeur de la Monnaie d'Aix de 1692 à 1702 et de 1704 à 1736. La fusée est la marque d'esprit, Charles-Marie-Jacques Cabassou, nommé graveur particulier le 25 novembre 1703 en remplacement de son frère Joseph.



Val d'Ardène frappa environ  400.000 pièces.



Plus près de Rochefort, dont l'arsenal fournissait la matière première, La Rochelle fut préférée  à Nantes et Bordeaux.



Le moulin de Gond qui n'en est pas très éloigné transformait la matière des canons avant de la couper en flancs. Cette annexe frappa plus de 600.000 de ces pièces. Sur les « Dardennes » fabriquées à La Rochelle, au droit, tout au début de la légende, après les mots : « Louis XIIII Roy de …» se trouve une mouchette d' hermine qui est la marque du graveur Jean Lizard ; au revers, avant le millésime de la frappe, se trouve une grenade enflammée « différent du directeur Jean Boitât qui, le 9 mars 1697, fut pourra de l'Office héréditaire et conseiller du Roi, directeur particulier et trésorier de la Monnaie de La Rochelle ».



Il est fait état des poinçons de « croix » et des poinçons de « pile » «  avec leur légende », servant à la frappe de ces pièces de six deniers, à compter de 1711 (Archives de l'Hérault, registre B. 464 et 465).



L'étude attentive de ces pièces d'un poids de 6,118 grammes fait apparaître de sensibles différences entre les monnayages d'Aix (Val d'Ardène). Montpellier et La  Rochelle (Gond).



Deux points situés dans les arcs enlacés de la croix fleurdelisée serviront à identifier les «  Dardennes » frappées et terminées dans l'atelier de l'arrière-pays toulonnais. On s'aperçut plus tard que ce détail figurait aussi sur les « Dardennes » rochellaises. Ces points étaient donc communs aux espèces frappées et définitivement achevées dans les ateliers qui se trouvaient près des annexes, primitivement destinées à préparer la matière et à couper les flancs.



Une particularité encore plus inattendue a retenu notre attention en lisant la très complète étude de M. Charles Roy : « La Rochelle, son atelier monétaire, 1215-1836. » (La Rochelle, imprimerie N. Texier, 1913.)



La très belle, très fine et très exacte reproduction de la « Dardenne » frappée à La Rochelle porte la marque de l'atelier d'Aix-en-Provence («et coetera»).



Sans aucun doute, historiens et numismates ont, là encore, des découvertes à faire.



Les poinçons de « croix » et les poinçons de « pile » des ateliers d'Aix et Montpellier varient eux aussi sensiblement. Dans la croix, où les deux points sont absents à Montpellier, dans la base des « L. », qui sont plus crochus ici que là. La position de la légende serait, elle aussi, légèrement différente.



Par arrêt du 9 septembre 1710, une émission supplémentaire de 400.000 livres fut ordonnée. Cette fois, c'est l'atelier de Perpignan qui devait procéder au monnayage. Cette frappe fut subitement arrêtée et n'eut aucune suite effective.



La « Dardenne » quoi qu'on ait pu dire et écrire (J. T. avril, Dictionnaire Provençal-Français, Apt, 1840), ne doit pas son nom à un homme, mais bien, comme on l'a vu plus haut, au fait qu'il existait au Val d'Ardène un Atelier important, un ensemble de machines parfaitement et immédiatement capables de fondre, refondre et traiter la matière des canons qui, coupés en flancs, frappée de poinçons, allait véhiculer ce nom de lieu.



Le 4 février 1771, l’allivrement de la forge ayant soulevé des  difficultés, la communauté de Toulon se soumet à la décision de M. Laugier dans le différend qui l'oppose à la communauté du Revest.



À dater de 1785, les forges de Val d'Ardène exécutent tous les travaux en fer pour les bâtiments de la Marine.



En 1788, sous la direction de MM. Ferrand et Aguillon, les recettes de l'atelier ne furent que de 10 livres ; 375 livres auraient été dépensées pour l’entretien et les réparations (livres trésoraires de Pierre Morin, Archives Communales de Toulon).



Mais les événements révolutionnaires apportent encore des perturbations dans la marche de l'établissement.



En   janvier   1792,  le  combustible,  charbon  de   terre,  manque.



De nouveaux différends surgissent entre les autorités et le sieur Joseph Aguillon. Celui-ci demande à conserver la jouissance des forges de Val d'Ardène, que possédait déjà son père, Pierre Aguillon. On échange des lettres, un avis favorable semble lui avoir été donné par le ministre de la Marine (An XIII). Par une lettre de M. Blavier, ingénieur en chef au Corps Royal des Mines, au conseiller d'État, directeur des Ponts et Chaussées. On apprend que, par acte notarié du 3 décembre 1819, le sieur Aguillon a vendu les forges à MM. Honnorat, Colombeau et Cie.



Le détail des installations et de la machinerie de cet établissement nous est fourni par « un projet d'affiches » qui date de 1820. «L'usine de Dardenne» comprend une affinerie, un grand martinet à deux foyers, un petit martinet à un seul feu, 16 petites forges à bras, 4 petites forges de chantiers également à bras. Ces machines, pour celles qui fonctionnent en dehors de toute main-d'œuvre, sont propulsées par un cours d'eau dérivé du canal communal de Toulon, « dit le Béal », mais le sieur Aguillon payait une redevance à la ville.



D’intéressantes précisions nous sont données sur le nombre d'ouvriers employés à la production, etc. Lorsque « l'usine » marchait normalement, elle employait trente ouvriers. En 1820, cinq ou six ouvriers seulement sont occupés. En pleine activité, « l'usine » pouvait fournir de 1.200 à 1.500 quintaux île fer, destinés en partie à la Marine Royale, en partie aux industries privées. À lui seul, le grand martinet pouvait fournir 200 quintaux d'ancres, d'essieux de charrettes, de plaques pour la papeterie.



Le combustible utilisé, principalement du charbon de bois, provenait surtout des forêts des environs de Toulon. La consommation annuelle était de « 12.000 à 15.000 quintaux ». Une certaine quantité de houille, « 4 à 5.000 hectolitres » était acheminée de Saint-Etienne, par le Rhône, et servait, elle aussi, à l'entretien des feux. Le grand martinet, à lui seul, consommait  800  hectolitres  de  houille  annuellement.



Au début du XIXème  siècle, cet établissement est appelé : « Forges Impériales Maritimes  »  (1807).



Une famille a participé activement à la marche de ces «Forges de l'État» (1304), il s'agit de la famille Vincent. Nous trouvons François Vincent, contremaître des « Forges », eu l'an XIII ; François Vincent, entrepreneur des « Forges de Dardennes » (1806) ; Joseph Vincent, maître des « Forges Impériales » (1808) ; Joseph Vincent, directeur des « Forges de Dardenne » (1810).



Un personnel subalterne qualifié exécute les travaux : Aimé Vincent. Pierre Pibreau, Etienne Giono, Daguerreau, Etienne Beiaudy, Alexandre Jean, Vincent Barley sont forgerons ou forgerons-cloutiers ; Gabriel Vial est contremaître des « Forges en 1812 ; Vincent Barbaroux et Pierre Hubac sont cloutiers.



Le nommé François Bouisson est sous-chef des « Forges Impériales Maritimes » en 1807.



Cet atelier semble avoir cessé toute activité vers le milieu du XIXème  siècle. La création d’industries similaires dans les villes voisines, plus aptes à recevoir combustibles et matières premières, amenèrent les responsables de cette entreprise à renoncer à toute fabrication.



Des installations plus modernes et moins coûteuses permettaient aux grands centres spécialisés d'avoir les commandes.



Le développement des ateliers de l’État ne permettait plus aux particuliers d'espérer  une activité rentable.



il faut ajouter que la captation des eaux ajoutait aux difficultés. Le débit du canal de la ville ayant diminué, la force motrice ralentissait le  rendement  des  engins.



Comme toutes les petites industries de l'amère-pays toulonnais, la «Forge de Dardennes», pour des raisons majeures, avait cessé de vivre.



Vers 1825, cet établissement fut transformé en papeterie.

 



Seigneurs et propriétaires du Val d’Ardène



Pendant tout le Moyen Age, la famille de Vintimille, des vicomtes de Marseille, a possédé plus de quatre-vingts fiefs et châteaux en Provence. Parmi ceux-ci, le Revest et Val d'Ardène.



Les seigneurs de Val d'Ardène sont issus de la famille de Vintimille et des familles provençales de Thomas, de Ripert, de Raisson, de Noble, du Revest. Aux XVe et XVIe siècles, la famille de Vintimille était en coseigneurie avec les de Thomas et les de Ripert. Au XVIIe siècle, ces deux familles se partageaient les terres du fief avec les de Noble et les consuls  de  Toulon.



Dernière descendante des seigneurs de Toulon (vicomtes de Marseille), Sibille, dame de Castellanne et de Trets, fille de Geoffroy III, fut mariée deux fois. Une première fois à Gibert de Baux : une seconde fois  à  Boniface  de  Castellanne.



Par ses premières volontés testamentaires, Sibille laissait le Revest et Val d'Ardène aux Chartreux de Montrieux. Revenant sur son testament le 16 août 1261, elle révoqua ses premiers écrits et transforma ses premières décisions. D'importants changements et additifs furent apportés au testament du 14 août 1261. Tous ses legs furent réduits de moitié, exception faite des legs pieux. Par acte du 29 novembre 1262, on apprend que le comte de Provence échange la part de seigneurie qu'il possédait au Revest. et qu'il tenait de Sibille contre une part de la seigneurie de Toulon, que détenaient de proches cousins de la testatrice.



Cet échange et les différentes clauses ajoutées au testament de Sibille sont généralement mal interprétés et ont donné lieu à résumés incorrects.



En août 1388, un bail emphytéotique fut passé entre Raymond de Montauban, seigneur de « Dardenne » et Pierre Textoris, du Revest, Val d'Ardène,  à l'époque, dépendait du domaine de Toulon.



Nous ne nous étendrons pas ici sur les longues et fastidieuses généalogies des familles de Thomas, de Ripert, de Noble, etc. Plusieurs ouvrages spécialisés   sur   la   noblesse   provençale,   renseigneront   chacun,   suivant l'intérêt qu'il  porte à l'une ou l'autre de ces branches.

Suzanne Teissère, veuve de François de Thomas, vendait, le 26 juillet 1781, « la terre, fief et seigneurie » à M. de Magalon. Ce dernier l'achetait pour un de ses parents, le marquis Monier de Castellet, chef d'escadre, directeur général du port et arsenal de la Marine du département de Toulon. Seigneur de Val d'Ardène, il présente ses preuves de noblesse et fut admis aux États Généraux de 1787 à 1789.



En août 1790, des émeutes éclatent à Toulon. Monier de Castellet, qui s'était retiré dans son domaine, se rend à Toulon pour affaire de famille, dans la journée du 11 août. Reconnu par la foule à l'entrée de la ville, il est menacé, conspué, et échappe à la hargne populaire grâce à l'intervention du maire et de six militaires qui l'ont reconnu et se sont interposés.



Par délibération du Directoire du département du Var, une médaille fut frappée à six exemplaires et remise à ceux qui «par leurs efforts généreux» sauvèrent la vie à un citoyen. La matrice et la façon de ces six médailles furent gravées par le sieur Tassin qui, pour son travail, reçut la somme de 180 livres. Au droit, on lisait : « Un citoyen sauvé -11 août 1790 ». Au revers : « La Nation, la Loi, le Roi », avec l'exergue «Département du Var». Un exemplaire de cette médaille existe au Cabinet des Médailles de  la Bibliothèque de Marseille.



La nation acquit la Val d'Ardène en 1794, comme bien d'émigré sur la personne de Monier de Castellet, qui avait fui en Espagne.



Le domaine fut vendu comme bien national les 21 et 26 Messidor An VI, à M. Rossel.



En 1813, le domaine de Val d'Ardène devient la propriété de M. Olive. Sept ans après, le 18 août 1820, le domaine devenait la propriété de M. joseph-François-Bernard de Tassis. Ce dernier s'empressa de remettre, à titre de compensation, la somme de 2.000 francs à Mme de Pierrevert, fille de Monier de Castelet, à qui la Révolution avait confisqué  cette terre.



Depuis cette date, sans discontinuer, le domaine appartient aux descendants de Joseph-François-Bernard de Tassis.



Malgré les assauts du temps et des hommes, la fière demeure continue.





Les Moulins de la Vallée d’Ardène



Promeneurs, touristes,  curieux  qui   vous  enfoncez  dans  la   reposante qui, à intervalles réguliers, jalonnent la route que vous suivez. Elles vallée de « Dardennes », jetez un regard sur ces solides constructions sont «  les moulins   ». Tous sont placés  judicieusement près d'une chute naturelle ou aménagée. Tous sont posés contre ce « méat  » ou «  béal de Dardennes » qui conduisait, depuis le Ragas et la Foux, l'eau nécessaire à leur fonctionnement. C'était  hier... Aujourd'hui, ces  moulins se  reposent...   Le  béal  est  en  partie  asséché.



Dès que vous passez l'usine Saint-Antoine, avant l'ancien octroi, encore quelques mètres, et le premier moulin était là, à la hauteur de la naissance de la vieille roule, sur la gauche. Le premier moulin n'est plus. Quelques marches inscrites dans la pierre de ce qui était le « méat », et des ruines. Un violent incendie eut raison de lui et des marchandises qu'une maison de fournitures pour la Marine y avait entreposées... c'était en   1910.



Nous parlons des moulins à farine,  les  plus  nombreux.



Le deuxième moulin était en contrebas de la vieille route, à hauteur du quartier « Cigalon  », presque en lace du «  Bar du Bon Coin ».



Ne cherchez plus le troisième moulin, la guerre est passée par là. Face à la Poudrière (Établissement de Saint-Pierre), un pont y conduisait. Le pont seul enjambe encore la rivière, mais le moulin a été détruit par l'explosion, en août  1944, d'une alvéole chargée de  poudre.



Le quatrième moulin est encore un peu plus haut, à droite ; sa belle façade rose s'élève, majestueuse et bien assise. Il servit de poste pour le réglage du tir sur l établissement militaire que nous venons de dépasser.



La chapelle de Saint-Pierre-ès-Liens passée, nous empruntons le boyau qui rejoint la route départementale et au carrefour nous entrons sur la terrasse du cinquième moulin. On le désigne généralement par le nom de son actuel propriétaire, M. Quadropani.



Le sixième moulin se cache derrière les petites maisons, à gauche avant le pont ; d'abord moulin à farine, il fut, par la suite, transformé en moulin à huile. Très belle construction de pierre.



Pour rencontrer le septième, il faut traverser le hameau d'Ardène et longer la rivière jusqu'à l’actuelle propriété «  Les Jeannettes ». Cette solide et coquette maison est bien le septième moulin. Il fit partie des nombreuses installations créées dès le XVIIème siècle pour l'exploitation du « martinet à poudre » devenu par la suite « l'Atelier des Forges de Dardennes ». Une très belle pièce voûtée ennoblit cet ensemble. Sur la terrasse, se trouvent des meules coniques très caractéristiques et en parfait état.



C'est ici que beaucoup de Toulonnais et d'étrangers firent connaissance avec l'excellente cuisine de Davin, dit « le Sourd ». Certaines dépendances de cette bâtisse furent, il y a soixante-dix ans, le non moins célèbre « Café-Restaurant du  Paridon ».



Quelques pas plus loin, la sobre et racée construction du « huitième ». C'est sur remplacement des premières installations du «. Martinet à Foudre » et de la première « Forge » qu'il fut élevé.



Le chemin, encore asphalté, monte ; nous passons devant ce qui fut le neuvième moulin et qui a peut-être fonctionné autrefois, occasionnellement, comme « paroir à drap ». Nous tournons sur la droite ; une haute silhouette encadrée de cyprès, de cyprès, silencieuse, veille : c'est le dixième moulin.



Celui-là même qui fut endommagé par l'explosion (en 1684) du martinet à poudre. Au milieu du XIIIème  siècle, il n'avait encore qu'un étage. La charpente de la toiture est un véritable chef-d'œuvre. L'exploitation, des huitième, neuvième et dixième moulins fut, pendant longtemps, assurée par les mêmes meuniers. Divers cachets, au pochoir, dispersés sur  les   murs   à   l'intérieur,   en   témoignent.



Lorsque le 23 septembre 1793 les troupes du général Carteaux s'emparent des Pomets, le ravitaillement en farine vers Toulon fut compromis. Les eaux furent détournées, le béal détruit. Les cinq moulins à farine, propriété de la ville de Toulon, brusquement s'arrêtèrent. Ceux-ci suffisaient à peine à ravitailler convenablement la population, qui fut consternée.



Les biscuits de la Marine, en réserve dans les magasins de l'Arsenal, furent vendus à la foule. Mais il fallait très rapidement pourvoir à la défection des moulins. Un détachement militaire partit sur le champ s'emparer des meules et les ramena en ville. Seuls, les quatre premiers moulins furent dégarnis de ces lourdes pièces de pierre ; les deux autres protégés par les troupes occupant les Pomets, ne purent être approchés. Amenées à Toulon, il fut impossible de faire tourner ces meules. Après de nombreuses études, les eaux de la source Saint-Philippe furent dirigées dans un canal qui, plus proche et mieux surveillé, permit la mise en marche d'un moulin.



Dès la fin du XIXe siècle, les moulins furent à l'origine des Habitations à Bon Marché. Quelques actionnaires de la « Société des Moulins » préconisèrent et décidèrent cette transformation qui fut très bien accueillie par la population laborieuse et toujours méritante de la vallée.



L’urbanisme moderne se doit de reconnaître les particularités d'antan. Rien ne se fait de « neuf » sans une profonde connaissance de l'évolution du passé.



Pour la Val d'Ardène, comme pour tout l’arrière-pays toulonnais, la construction, la modernisation doivent être élaborées avec prudence et une grande logique. Le tourisme dont on parle tant, attend tout des ensembles naturels. Il faut commencer par protéger et faire en sorte que rien n'abîme ou ne dépareille un paysage superbement classique, dont chaque pierre recèle une image des faits et gestes d'autrefois.







Marseille-Dardennes

1942-1962





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« Mémoires de Louis RICHAUD, sous la Révolte de Toulon et L'Émigration », par R. BUSQUET, B. ROBERTY et A.-J. PARES.

ARCHIVES COMMUNALES DE TOULON : B.B, 35, F° 3-6 : B.B. 39, F° 5 ; B.B. 40, F° 3 ; B.B. 41, F° 58-165-241 : B.B. 42, F° 11-16 ; B.B. 43. F° 34-47-119 ; B.B. 46, F° 47 ; B.B. 57, F° 52-113-250 ; B.B. 58, F° 212-270-278-314 ; B.B. 59, F° 94-125-162-220-274 ; B.B. 60, F° 46-05-110 ; B.B. 61, F° 15-266-336-399 ; B.B.62, F° 286 ; B.B. 64, F° 342-348-392-399-403 ; B.B. 65, F° 15-36-79-93 ; B.B. 66, F° 155 ; B.B. 67, F° 246-309 ; B.B. 68, F° 64-121 ; B.B. 69, F° 25-185 ; B.B. 70, F° 1 ; B.B. 72, F°207 ; B.B. 79. F° 60 : B.B. 84, F° 79 ; CC. 561, 377, 378, 603, 1.637, 1.644.

ARCHIVES DE LA MARINE : B. 3.272, F° 157 ; B. 3.296, F° 363-385. ARCHIVES DE FRANCE (Bibliothèque Nationale) : F. 14, 4.488.

ARCHIVES COMMUNALES DE LA VILLE DE TOULON : B.B. 35 ; B.B. 41 : B.B. 42 ; B.B. 43.

Diverses correspondances avec les différents services d'Archives départementales, et particuliers spécialisés.

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